Joëlle

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Je participe avec plaisir à cet échange de couleurs. Si on ne s’ouvre pas aux autres cultures, on ne connaît rien. Le mélange des couleurs, c’est magnifique. Quand les femmes de toutes les origines s’habillent avec leurs belles robes, c’est vraiment très beau. Nous, on ne les met plus que pour les fêtes. C’est dommage.

Je suis arrivée Ici à 6 ans, chez une tante, pour compenser le chagrin d’une perte. Finalement, c’est une autre tante qui m’a prise chez elle. Elle avait une fille à peu près de mon âge. Nous nous entendions bien, nous étions traitées sur le même pied. J’étais dans un petit cocon. À l’école, ma cousine et moi étions les seules noires. Quand on m’a dit « Tu ressembles à du caca », il a fallu riposter pour être respectée. Ensuite, quand j’ai travaillé, ça ne m’a pas affectée plus que ça. Maintenant je peux répondre à ça.

Je suis peut-être un peu plus d’Ici que de là-bas. Mon Ici, c’est là où j’ai grandi, où j’ai été scolarisée, où j’ai travaillé. Là où je vis. J’y suis bien.

Mon Ailleurs, C’est une île très lointaine. On y parle une langue mélangée qu’il a fallu que j’apprenne. Je la parle avec l’accent d’Ici, je la porte en moi. Mon Ailleurs, c’est une image de cascades, de nature luxuriante. Il y a la mer. C’est aussi la nourriture : le cochon roussi, les pois d’Angole, le shrubb… Mon île me manque parfois mais je n’en suis pas nostalgique. Je suis bien ici et, quand je suis là-bas, j’y suis bien aussi. Il y a un équilibre entre les deux.

Mon Ailleurs s’est transmis à ma fille par son lien avec sa cousine, la langue de là-bas et aussi par les bouquins de tous nos écrivains, Césaire le premier.

Pour mon enterrement, là où je serai, on m’enterrera. La terre est la même Ici que là-bas.