Nouchka

L’Ailleurs, l’Ici, n’ont pas été faciles pour moi. Ici, là-bas, c’était dur. J’avais 18 ans lorsque je suis arrivée Ici pour rejoindre ma mère, ma famille. Ma mère a quitté le pays de mon Ailleurs quand j’étais petite et a refait sa vie Ici. Pendant son absence, c’est ma grand-mère qui me donnait de la force quand j’étais malade, quand je pleurais en pensant à ma mère. C’était dur.
À mon arrivée Ici, je ne pouvais rien faire parce que je n’avais pas de papiers, ni continuer mes études, ni travailler, ni passer mon permis : je ne pouvais rien faire. Je n’osais pas sortir, je ne voyais pas ma place Ici. Et puis, au centre social, j’ai participé à des activités, j’ai rencontré des personnes qui m’ont aidée. Elles m’ont soutenue même quand je voulais abandonner, quand c’était dur et que j’avais perdu la joie de vivre. Je disais : « C’est injuste ». Il a fallu sept ans pour que j’aie des papiers. J’ai pu faire une formation et maintenant je travaille, j’ai mon « chez moi », je suis heureuse.
Le pays de mon Ailleurs fait partie d’un grand continent du sud. Ce qui me manque le plus, c’est ma grand-mère, mes amis, et puis le goût des fruits, les mangues, les fêtes ensemble, en famille.
Les gens d’Ici sont un petit peu enfermés sur eux. Dans mon Ailleurs, on est unis, on ne regarde pas la couleur de peau, la religion. J’ai appris la culture d’Ici, j’ai apporté celle de mon Ailleurs avec la danse. J’ai donné des cours et ça m’a aidé à avancer, à oublier mes problèmes, à retrouver un peu ma joie.
Ailleurs, Ici, les deux font partie de moi. Quand je cuisine je mélange les deux : parfois cuisine d’Ici, parfois cuisine de mon Ailleurs.
À mes enfants, je transmettrai mon histoire pour leur montrer que la vie est un combat, qu’il ne faut pas baisser les bras.