Destruction
Exposition - Meaux, parc Chenonceaux
Destruction… deux tours du quartier Beauval, les tours Camargue et Chambord, ont été détruites en décembre, quelques jours avant Noël. J’avais, juste avant la pandémie, visiter une de celles qui étaient déjà tombées, il n’y avait plus qu’une carcasse. Tout avait disparu à l’intérieur, plus de cloison, de mur séparateur, d’espace cuisine ou salle de bain, de prise… Juste de vaste plateau venteux où il était difficile d’imaginer que des gens avaient pu vivre pendant des décennies.
Lorsque les tours sont tombées, des cris, de l’émotion… « On y vivait bien ! », même dans le bruit, un quartier mal famé, la foule qui y vivait, les ascenseurs en panne. On y vivait bien, disaient les gens émus, on y a nos souvenirs, les enfants y ont grandi, nos amis, nos voisins. Ils ne se souvenaient plus des trafics dangereux, des voitures brûlées, des écoles sans ressources, de la simple difficulté d’y vivre. Passer sous les fenêtres pouvaient même être dangereux. On raconte qu’une bouche d’égout fut lancée du haut d’une tour et a grièvement blessé un homme qui marchait.
Dans les tours, des restes de papiers peints où l’on peut encore distinguer une chambre d’enfant, ou celle des parents, peut-être. Le carrelage de la cuisine, blanc encore immaculé sinon un petit autocollant, une petite grenouille qui saute joyeuse. Tel carreaux évoquent peut-être le Maghreb.
Explosion, un bruit infernal malgré la distance, qui frappe la poitrine, qui surprend et paralyse le doigt sur l’appareil photographique. Vite, appuyer, six photographies, tout est tombé. La brutalité est immense, vive par sa brièveté. Surprise, dans les ruines, quelques jours plus tard, je retrouverai certains détails photographiés, dans un amas de dalles écrasées qu’on retrouve peut-être après un tremblement de terre ou un bombardement.
Oui, mais, on y a vécu, on se souvient, comme des racines qu’on arrache, foudroyées.
Exposition sur les grilles du parc Chenonceaux à Meaux, Meaux – Décembre 2024 – Janvier 2025.