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Les parapluies

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Il pleut, il pleut beaucoup, lumière pas terrible, je prends les photographies à ISO 1600, c’est très rare, je n’aime pas pousser mon appareil photographique de conception un peu ancienne aussi haut dans la sensibilité. Il répondra pourtant remarquablement bien. Il pleut, je vais prendre des parapluies en photo, des gens qui marchent autour du Louvre, dans les riches rues parisiennes délaissées : il pleut vraiment, il fait froid, il y a du vent.
Place Colette d’abord, avec cet extraordinaire bâtiment miroir qui reflète son pourtour et disparaît. Conjugué à la réflectance du sol mouillé, l’effet est saisissant. Des parapluies de toutes sortes, des grands, des petits, des retournés… Dans les jardins du Palais royal, il y a même un parapluie Buren ! L’homme est passé devant moi avec son chien, je n’étais pas prêt. Et miraculeusement, il a réapparu, traversant les colonnes. Il est un peu loin, tant pis.
Une femme, avec son parapluie éclatant. Je la prends plusieurs fois, et je choisis la photographie qui la masque. Elle est à l’abris sous son parapluie, de mon objectif également.
Direction la pyramide du Louvre. Il n’y a vraiment pas grand monde, il fait réellement très mauvais. Je prends encore des parapluies. Les marchands ambulants ne vendent pas d’eau, ils n’offrent pas de photos, ils vendent des parapluies avec l’Arc de triomphe, au Louvre…
Une jeune femme pose sous la pluie, moi je suis à l’abris sous le porche. Elle croise les jambes, elle sait que c’est comme cela qu’on affine sa silhouette, croiser les jambes. Tiens, le parapluie fuchsia est revenu… non, ce n’est pas lui, c’est son frère, ou plutôt ses sœurs. Deux jeunes femmes d’allure maghrébine essayent de se prendre en photographie avec leur téléphone posé au sol. Pas facile. Je leur offre mes services :
« Where are you from ?
– Holland ! » Loupé, ne jamais se fier aux apparences. Je ris en moi-même et j’oublie de les prendre en portrait !

Des anglais, parapluie bien voyant, le sol mouillé de l’esplanade est magnifique. Je n’ai jamais vu la pyramide avec aussi peu de monde ; je peux même en faire des photographies sans être dérangé ; je suis mouillé, mais ma veste bretonne résiste à la pluie, vive la Bretagne.

Un femme d’allure africaine m’aborde et me demande combien coûte une photographie. Je commence par lui dire que je ne suis pas professionnel de la photo, elle m’aborde en anglais. Puis je me reprends, et je lui dis que si elle me donne son mail, je lui envoie. C’est pour l’anniversaire de son fils, qui a 10 ans. Vite, allons sur l’esplanade, il n’y a personne devant la pyramide, il pleut. Elle veut gonfler deux ballons volumineux, un 1 et un 0, pour marquer les dix ans de son fils ; il pleut, il fait froid, je lui demande juste de montrer 10 avec ses doigts. Rafael monte sur un plot, il fait dix, je trouve qu’il est très beau. Sa maman l’a recoiffé avec tendresse, a hésité à lui enlever son manteau, mais il pleut trop. Sa sœur maintenant, Mariana, chevelure impressionnante que je lui demande d’écarter, je veux voir son visage. La chevelure résistera ! La maman maintenant, Mesfin. Elle sourit, presqu’intimidée. C’est la fête aujourd’hui pour les enfants, ils portent un milkshake et pourtant, il fait si froid !
Ils garderont un bon souvenir de Paris.
« Where are you from ?
– Ethiopia ! »
Bon, je ne me suis pas trompé cette fois-ci. C’était vraiment sympathique. Il est temps de repartir. Un couple se prend en photo, lui d’abord, elle ensuite. Ils me demandent de les photographier avec leur téléphone, Je tourne autour du couple posant et souriant : « One more… another one », ils auront plusieurs vues du Louvre. « Je prends mon appareil : « And this one for me ! » Une, deux, trois photos, ils sourient.

J’aime ces moments de rencontres fugaces. Quelques fois, je ne dis rien, d’autres fois, les gens me voient, comme cette jeune femme qui me fait un signe de main en me souriant. D’autres fois, je prends un mail et j’envoie les photos.

Je sors du Louvre. Sur le trottoir , derrière un calicot publicitaire rouge vif, juste à côté de la fondation d’un homme très, très riche, un prédateur, un bus passe, s’arrête au feu, une publicité : « Enfin proprio ! »… pas lui sous sa tente, sur ce trottoir détrempé, en pente. D’ailleurs, je suis surpris que la police ne l’ait pas encore délogé. La pluie certainement, on ne patrouille pas sous une telle pluie. La pluie, l’eau des pauvres.

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